Physio Logis : une clinique pas comme les autres

Antoine Deschamps-Laporte et Jihane Wahid travaillaient ensemble dans une clinique de physiothérapie à Montréal avant de se lancer à leur compte et d’ouvrir leur clinique basée à Repentigny.

À défaut de trouver un modèle qui leur correspond, les deux entrepreneur·e·s ont choisi de créer leur propre modèle pour travailler auprès d’une clientèle souvent oubliée des cliniques traditionnelles.

Leur clinique Physio Logis offre aujourd’hui des services de réadaptation fonctionnelle à des personnes qui vivent avec des conditions neurologiques. Sclérose en plaques, Parkinson, AVC, blessure à la moelle épinière, accident de la route…

Tant de personnes qui se retrouvent souvent laissées à elles-mêmes. Prises entre les listes d’attente au public et des services inadaptés au privé.

Tomber entre deux chaises

Lorsqu’une personne subit un accident de la route ou un AVC, par exemple, elle est hospitalisée durant un certain temps avant d’être transférée à l’Unité de réadaptation fonctionnelle intensive (URFI). Elle est ensuite référée en clinique externe pour poursuivre sa réadaptation.

Seul problème : les délais en clinique externe sont longs. Très longs. Pour une condition subaiguë (symptômes de faible intensité mais qui se prolongent et s’atténuent que faiblement), l’attente peut aller jusqu’à 2 ou 3 mois et elle peut dépasser 6 à 18 mois pour une condition chronique dans la plupart des régions du Québec.

Face à cette attente interminable au public, on présente souvent le privé comme étant une solution de rechange.

Mais, contrairement à Physio Logis, la majorité des cliniques privées en physiothérapie s’adressent uniquement à la population « générale » qui vit avec des troubles musculosquelettiques. Leur personnel n’est donc pas spécialisé en troubles neurologiques et leur équipement n’est pas adapté aux besoins de cette clientèle.

Et ça, c’est sans compter les coûts élevés des cliniques privées traditionnelles alors que ces personnes connaissent des défis liés à l’emploi étant donné leurs conditions neurologiques.

Au-delà de l’impatience qui peut se faire ressentir durant cette période d’attente, l’absence de suivi rapide a aussi un impact majeur sur leur santé. Plus les délais sont longs, plus la mobilité et la motricité sont difficilement récupérables.

« Tout le monde du milieu sait qu’il est plus facile et moins coûteux de prévenir le déconditionnement que de le renverser après qu’il se soit installé durant 1 ou 2 ans. Une intervention précoce peut faire toute la différence », affirme Antoine.

Même si une personne finit par avoir une place en clinique externe, parfois les patients désirent aller plus loin que les objectifs atteints en réadaptation. Physio Logis permet alors de compléter ce qui a été entamé en clinique externe − en plus de servir les personnes en attente.

Plusieurs troubles neurologiques nécessitent un suivi à long terme. C’est notamment le cas des maladies chroniques ou dégénératives, comme la sclérose en plaques.

« Les personnes avec des conditions neurologiques, surtout celles qui sont chroniques, tombent entre deux chaises. Les gens qui ont normalement accès à la réadaptation au public sont ceux qui ont une condition aiguë, une hospitalisation, une chirurgie. Pour quelqu’un atteint de sclérose en plaques ou de Parkinson depuis 10 ans, ou qui a fait un AVC il y a 3 ans, les services au public sont inexistants », affirme Antoine.

Pour répondre aux besoins des personnes qui vivent avec des conditions neurologiques, Antoine et Jihane ont donc développé un modèle de clinique qui se trouve, lui aussi, entre deux chaises. Entre le privé et le public.

« Bien que notre clinique soit privée, nous croyons qu’il existe une sorte de modèle hybride qui pourrait émerger en empruntant certaines caractéristiques aux secteurs privé et public. Si nous agençons le côté adaptatif, créatif et proactif du secteur privé d’une part, et le réseau d’intervenant·e·s et les ressources du public de l’autre, nous serons capables de donner de meilleurs services à cette clientèle actuellement orpheline », confie Antoine.

Tout part des besoins

L’accessibilité est au cœur de ce que fait Physio Logis.

Espace aménagé pour personnes à mobilité réduite, salle de bain adaptée, système de suspension, barres parallèles, ascenseur… Jihane et Antoine ont pensé à tout.

« Notre plus grande fierté, c’est d’avoir donné vie à ce qu’on avait imaginé. Une clinique qui répond exactement aux besoins des personnes avec des troubles neurologiques », explique Jihane.

Évidemment, ça sous-entend des coûts plus élevés. Mais pour Jihane et Antoine, cet investissement était essentiel pour répondre au mieux aux besoins des personnes qui vivent avec des conditions neurologiques. « Étant donné notre clientèle, on est très différents des autres cliniques. On n’a pas le choix d’être différents », affirme Jihane.

Le prix des séances de physiothérapie a aussi été adapté selon les moyens de leur clientèle. Jihane et Antoine envisagent en plus offrir des soins en pro bono à l’avenir. Les deux entrepreneur·e·s ont également établi un partenariat avec le CIUSSS de Lanaudière qui couvre les frais pour certain·e·s patient·e·s qui figurent sur une liste d’attente depuis longtemps.

Physio Logis se démarque par la flexibilité du temps alloué aux rendez-vous qui varie selon les besoins des patient·e·s. Jihane et Antoine souhaitent prendre le temps qu’il faut avec leurs patient·e·s plutôt que d’adopter une approche trop « rigide ».

Coûts élevés pour les équipements, tarifs adaptés aux moyens financiers de leur clientèle, plus de temps alloué aux patient·e·s… Bien que ces choix soient justifiés sur le plan clinique, ils représentent aussi un défi pour la rentabilité de leur entreprise.

Entre la physiothérapie et l’entrepreneuriat

Avant d’être des entrepreneur·e·s, Jihane et Antoine se définissent d’abord et avant tout comme des physiothérapeutes.

« On est d’excellent·e·s physiothérapeutes, mais au niveau gestion, on a eu besoin de se former. (…) Est-ce qu’on pense comme des entrepreneur·e·s ou comme des physiothérapeutes? C’est déchirant parfois. On doit penser aux patient·e·s. Mais on doit aussi penser à la survie de notre clinique si on veut continuer d’offrir nos services », confie Jihane.

Comment fait-on pour concilier nos valeurs sociales avec la rentabilité de notre entreprise? C’est une question sur les lèvres de plusieurs entrepreneur·e·s d’impact.

Jihane conseille d’aller chercher des conseils à l’externe pour ensuite les adapter à votre réalité en tant qu’entreprise d’impact. Mais elle avoue que ce n’est pas toujours facile de trouver le juste milieu.

Pour chaque décision, Antoine et Jihane se mettent à la place de leur clientèle et se demandent « Quel impact ça aurait sur moi si j’étais moi-même un·e patient·e? »

Comme quoi, quand vient le temps de prendre des décisions, l’impact auprès de la clientèle pèse parfois plus lourd que la croissance de l’entreprise.

« On pourrait faire plus d’argent. [Mais] quand on voit l’impact de ce qu’on fait, ça nous rappelle que ça en vaut la peine. »

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Grâce à l’engagement de précieux partenaires: Économie Québec, par l’entremise de son mandataire Investissement Québec, la Banque Nationale, la Banque de développement du Canada (BDC), le Fonds de solidarité FTQ et Fondaction, Evol dispose d’une enveloppe d’envergure pour soutenir, par le biais de prêts conventionnels, des entreprises à propriété inclusive et diversifiée, générant des impacts sociaux et environnementaux positifs alignés sur les objectifs de développement durable de l’ONU (ODD).

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Pour en savoir plus sur Physio Logis :

Charles Saliba-Couture

Copywriter, Les mots pour la cause

Charles est copywriter. Ou rédacteur persuasif en français. Il travaille à son compte depuis 2020 et met ses mots au service d’OBNL, de fondations et d’entreprises qui portent toutes sortes de causes sociales. Avec son entreprise Les mots pour la cause, Charles s’est donné comme objectif d’en finir avec l’indifférence. Il offre des services de copywriting et de coaching pour apprendre à persuader avec les mots. Charles accompagne aussi des organisations qui souhaitent adopter l’écriture inclusive (formations, outils, guide, politique, etc.).